
La peur que l'intelligence artificielle ne prenne nos emplois n'est pas nouvelle, mais elle a gagné en intensité ces derniers mois à mesure que l'IA transforme la manière de travailler. Plus de la moitié des Américains s'inquiètent de l'impact de l'IA sur le lieu de travail, et un tiers pensent qu'elle réduira les opportunités d'emploi à long terme. Cependant, les experts du secteur technologique sont partagés quant à savoir si l'IA va véritablement "décimer" les emplois ou simplement les transformer.
Des avertissements et des preuves de déplacement
Certains prédisent un impact significatif. Dario Amodei, PDG d'Anthropic, a alerté en mai que l'IA pourrait faire grimper le chômage, en particulier pour les emplois de cols blancs, à 20 % au cours des un à cinq prochaines années. Des entreprises comme Meta, Microsoft et Salesforce utilisent déjà de plus en plus l'IA pour le codage et d'autres tâches. Les PDG d'Amazon et de JPMorgan ont également prévenu que leurs effectifs humains diminueraient à cause de l'IA.
L'émergence des systèmes d'IA "agentiques" est un facteur clé de cette préoccupation. Contrairement aux chatbots qui nécessitent des invites étape par étape, ces systèmes peuvent gérer des tâches complexes en plusieurs étapes de manière autonome. Swami Sivasubramanian, vice-président de l'IA agentique chez Amazon Web Services, explique que ces systèmes peuvent se fixer un objectif et le décomposer en une séquence d'étapes, agissant comme un "système de raisonnement et de réflexion" capable d'utiliser divers outils.
Les chiffres sont parlants :
Amazon a utilisé un agent développeur IA pour mettre à niveau 30 000 applications logicielles en six mois, une tâche qui aurait pris un an à 4 500 développeurs, économisant environ 250 millions de dollars.
Microsoft utilise l'IA pour générer 20% à 30% de son code.
Salesforce utilise l'IA pour 30% à 50% de son travail.
De plus, l'IA est relativement facile à adopter car les "travailleurs IA" sont simplement des logiciels, ne nécessitant pas de machinerie physique coûteuse et pouvant être facilement mis à jour. Un ancien chercheur d'OpenAI, Steven Adler, s'attend à ce que de nombreux travailleurs de cols blancs voient leurs salaires baisser, l'IA rendant les travailleurs plus productifs et augmentant l'offre de main-d'œuvre, ce qui "pousse les salaires à la baisse".
Une transformation plutôt qu'une élimination
Cependant, de nombreux experts appellent à la prudence face à ces prédictions alarmistes, suggérant que le message selon lequel "l'IA est si bonne qu'elle va priver les humains d'emploi" peut aussi être un argument marketing pour les entreprises qui vendent la technologie, ou une excuse pour les dirigeants envisageant déjà des réductions d'effectifs.
Jensen Huang, PDG de Nvidia, a déclaré que l'IA ne tuerait des emplois que si "le monde manquait d'idées".
Demis Hassabis, PDG de Google DeepMind, considère une "jobpocalypse" comme une de ses moindres préoccupations.
Il existe un large consensus sur le fait que la nature du travail va changer, et peut-être plus rapidement qu'avec les transformations technologiques précédentes. Gaurab Bansal, directeur exécutif de Responsible Innovation Labs, parle d'un "remodelage complexe, plutôt qu'une élimination simple". La plupart des travailleurs, selon les experts, utiliseront l'IA pour automatiser les tâches répétitives, leur laissant plus de temps pour les aspects créatifs ou relationnels de leur emploi. Yann LeCun, scientifique en chef de l'IA chez Meta, a souligné que "la plupart des tâches pour la plupart des emplois ne peuvent pas être automatisées".
L'IA pourrait également créer de nouvelles catégories d'emplois que nous ne pouvons pas encore imaginer, à l'instar de l'ère Internet qui a généré des milliers de milliards de dollars de valeur économique. Des entreprises et des gouvernements investissent déjà dans la formation des travailleurs à l'ère de l'IA.
Un avenir incertain et la nécessité d'un nouveau contrat social
Nous entrons dans une période d'incertitude qui pourrait durer une décennie, voire plus. La transition pourrait être inconfortable. Il est crucial que les décideurs politiques créent un nouveau cadre économique pour l'ère de l'IA afin de garantir que ce ne soient pas seulement les puissantes entreprises technologiques qui en bénéficient, aux dépens des travailleurs ordinaires confrontés à moins d'opportunités et à plus de pression. Comme le dit Bansal, "Nous avons besoin d'un nouveau contrat social pour cette ère".
En fin de compte, l'IA n'est pas tant une onde de choc qui rase tout sur son passage qu'une force tellurique qui remodèle le paysage du travail, créant de nouvelles vallées et montagnes d'opportunités, tout en submergeant d'anciennes plaines.
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